Lignes directrices sur l’utilisation des outils d’intelligence artificielle générative

Mise à jour : octobre 2023

Préambule

L’émergence des sources ouvertes d’intelligence artificielle générative ayant la capacité de générer des textes, images et vidéos inédits sur demande constitue une formidable avancée technologique et offre un potentiel énorme pour les salles de rédaction. Mais il est évident qu’elle soulève également plusieurs enjeux éthiques pour la profession journalistique et pour la société en général.

Ces lignes directrices visent à encadrer l’utilisation des outils d’intelligence artificielle générative, dans un contexte où elle comporte le risque de transmettre de l’information à nos lecteurs qui n’est pas à la hauteur des standards de La Presse et des normes et pratiques journalistiques applicables dans la profession.

Les présentes lignes directrices entrent en vigueur dès leur diffusion et seront révisées et mises à jour régulièrement, au fur et à mesure des évolutions des outils d’intelligence artificielle générative et de notre réflexion à leurs égards.

Les lignes directrices encadrant le travail de notre salle de rédaction sont à distinguer des lignes directrices concernant la publicité sur nos plateformes. Ces lignes directrices sont disponibles ici.

Aperçu

  • Les présentes lignes directrices énoncent certaines utilisations autorisées des outils d’IA génératives, c’est-à-dire qui permettent de créer du contenu.
  • Il est obligatoire de valider toute autre utilisation projetée des outils d’IA générative auprès de la direction de l’Information et, le cas échéant, du contentieux;
  • Il est interdit d’utiliser des outils externes d’IA générative afin de produire des textes, photos, vidéos ou images destinés à publication ou afin d’éditer ceux-ci, à moins d’une autorisation de la direction de l’Information;
  • Il est obligatoire d’effectuer une révision et une validation de tout résultat obtenu à partir d’un outil d’IA générative avant de l’utiliser aux fins de publication;
  • Il est obligatoire de donner le crédit aux outils externes d’IA générative si on les utilise, avec permission, pour créer du contenu destiné à la publication;
  • Il est interdit de soumettre des textes non publiés ou du matériel journalistique confidentiel, tels des enregistrements d’entrevues ou de rencontres, à des outils externes d’IA générative (à distinguer des outils en circuits internes fermés à La Presse, qui sont à développer*);
  • Il est interdit de s’en remettre aux résumés de documents produits par les outils externes d’IA générative à titre de source d’information, sans prendre connaissance des documents intégraux.
  • La Presse encourage ses journalistes à se tenir informés des développements des outils d’IA générative et à réfléchir aux enjeux éthiques qu’ils soulèvent.

Champ d’application

Les présentes lignes directrices s’appliquent à l’ensemble des membres du personnel de la salle de rédaction de La Presse, soit, les membres de la direction de l’Information et les journalistes des services de l’Information, incluant les journalistes au pupitre, graphistes, les photographes, les vidéastes ainsi que tous les collaborateurs et stagiaires au service de l’Information de La Presse. Elles doivent être interprétées à la lumière du Guide des normes et pratiques journalistiques de La Presse.

Contexte

Les différents outils d’IA générative sont, entre autres, susceptibles de produire et de diffuser de fausses informations, des informations diffamatoires ou qui portent atteinte au droit à la vie privée, des informations soumises à des interdits de publication et du contenu violant les droits d’auteur de tiers. 

L’IA générative comporte ainsi des risques juridiques et réputationnels pour La Presse et ses journalistes, puisque si elle est utilisée sans les précautions et garde-fous appropriés, elle peut entraîner leur responsabilité juridique, miner leur crédibilité et affecter le lien de confiance du public à leur égard.

Consciente qu’il est inutile, voire contre-productif de s’opposer aux avancées technologiques, La Presse souhaite encourager ses journalistes et artisans à explorer les différentes possibilités offertes par les outils externes d’IA générative, tout en adoptant une approche prudente à l’égard de leurs utilisations, en raison des dangers potentiels de ces nouvelles technologies.

Ainsi, toute utilisation des outils externes d’IA générative par un membre de la salle de rédaction qui n’est pas déjà autorisée par les présentes lignes directrices devra d’abord être autorisée par son gestionnaire, et impérativement être divulguée à celui-ci.

Par ailleurs, pour nous assurer d’adopter les meilleures pratiques dans l’utilisation des outils d’IA générative, il est nécessaire de les concevoir à travers le prisme du Guide des normes et pratiques journalistiques de La Presse, qui énonce notamment les valeurs de recherche de la vérité, d’honnêteté et de connaissance des sujets traités, qui doivent en tout temps être au cœur de la démarche journalistique.

La recherche de la vérité et l’IA

Afin de respecter notre engagement de recherche de la vérité, il est primordial d’adopter une attitude de scepticisme à l’égard de toute information recueillie auprès d’une source d’IA générative et de vérifier et confirmer la validité de ces informations de manière indépendante avant de les utiliser. Au risque de redite, les outils d’IA sont susceptibles de véhiculer des informations fausses, inexactes, périmées ou incomplètes, d’où l’importance d’effectuer toutes les vérifications et d’obtenir toutes les corroborations nécessaires avant d’utiliser une information obtenue auprès de l’IA générative.

Les outils d’IA générative peuvent également refléter les biais des sources qui servent à l’alimenter. Ainsi, il est obligatoire d’effectuer une révision et une validation par un humain de tout résultat obtenu à partir d’un outil d’IA générative avant de l’utiliser aux fins de publication.

La connaissance des sujets traités et l’IA

Les journalistes doivent avoir une bonne connaissance des sujets qu’ils sont appelés à traiter. Pour cette raison, il est interdit de s’en remettre aux résumés de documents produits par les outils externes d’IA générative en guise de source d’information, sans prendre connaissance des documents intégraux.

L’honnêteté et l’IA

Il est indispensable d’être transparent avec les lecteurs lorsqu’on publie du matériel produit en tout ou en partie avec l’IA générative, afin de préserver l’intégrité et la réputation de La Presse et de ses journalistes ainsi que le lien de confiance avec les lecteurs. Publier du contenu produit par les outils externes d’IA générative, tels ChatGPT, Bing Chat, Bard, Midjourney ou Dall-E, sans en divulguer la source est une forme de plagiat et constitue une tromperie envers nos lecteurs et pourra en conséquence faire l’objet de sanctions disciplinaires. Pour ces raisons, il est obligatoire de donner le crédit aux outils externes d’IA générative si on les utilise pour créer du contenu destiné à la publication, après avoir obtenu une autorisation à cet effet.

Les utilisations autorisées

L’IA doit être employée comme un outil au service des journalistes et autres employés de la salle de rédaction et non comme un moyen de se substituer à eux. Ainsi, La Presse interdit aux membres de la rédaction d’utiliser des outils externes d’IA générative afin de produire des textes, photos, vidéos ou images destinés à la publication ou afin d’éditer ceux-ci sans avoir au préalable obtenu l’autorisation de la direction de l’Information, sauf dans la mesure où ces outils sont utilisés pour écrire sur le sujet de l’IA.

À titre indicatif, voici certaines utilisations des outils d’IA qui sont autorisées à l’heure actuelle sans nécessité d’obtenir une autorisation additionnelle :

  • effectuer des recherches afin d’obtenir des informations sur le contexte sous-jacent à un sujet donné en amont de la démarche journalistique (à la manière de Wikipédia);
  • préparation d’entrevues, transcription de rencontres et d’entrevues enregistrées (uniquement à partir de circuits internes fermés, pour éviter que ces informations ne deviennent publiques);
  • traduction de textes ou de citations dans une langue étrangère, à partir d’applications de traduction fiables;
  • remue-méninges pour les sujets de textes et idées de reportages;
  • remue-méninges pour les titres de textes non publiés (uniquement à partir de circuits internes fermés, pour éviter que ces textes ne deviennent publics);
  • remue-méninges pour le libellé des bas de vignettes, légendes et rubriques « ce qu’il faut savoir » (uniquement à partir de circuits internes fermés, pour éviter que ces contenus ne deviennent publics);
  • remue-méninges pour les titres de publications et les alertes sur nos médias sociaux à l’égard de textes déjà publiés;
  • préparation de résumés de textes déjà publiés émanant de La Presse.

Les utilisations susmentionnées ne constituent pas une liste exhaustive de ce qui est autorisé par La Presse. Il est toutefois obligatoire de valider toute autre utilisation projetée de l’IA générative auprès de la direction de l’Information et, le cas échéant, du contentieux.

Outils internes et externes

Il est formellement interdit de soumettre des textes non publiés ou du matériel journalistique confidentiel, tels des enregistrements d’entrevues ou de rencontres, à des sources ouvertes d’IA générative (outils externes), pour ne pas qu’ils alimentent ces outils externes et deviennent, par le fait même, publics.

Les outils en circuits internes fermés (outils internes) sont des outils d’IA similaires à ce qu’on peut trouver sur internet (ChatGPT, Bard, et Midjourney, par exemple) mais où toutes les informations qu’on soumet restent en tout temps sur les serveurs de La Presse. Ces outils sont actuellement en développement, vous serez informés dès qu’ils seront disponibles.

Modification des présentes lignes directrices

Étant donné la vitesse fulgurante des avancées technologiques en matière d’intelligence artificielle, les présentes lignes directrices sont nécessairement vouées à être modifiées dans le futur. La Presse encourage d’ailleurs les membres de sa salle de rédaction à se tenir informés des développements des outils d’IA générative, à réfléchir aux enjeux éthiques qu’ils soulèvent et à partager leurs réflexions à cet égard avec leurs collègues et la direction de l’Information.

* Nous distinguons dans cette politique les « outils externes », offerts par des entreprises tierces (comme ChatGPT et Dall-E), et les outils en circuits internes fermés, qui sont à développer (intégration d’un outil qui suggère des titres, par exemple, ou qui propose un libellé pour les réseaux sociaux).